Une société peut-elle être indemnisée en justice au titre d’un préjudice moral subi ?

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Lors des procès touchant notamment au droit commercial, ou au droit civil, la question se pose fréquemment de savoir si une société peut solliciter suite aux agissements dont elle a été victime, des dommages-intérêts au titre du préjudice moral qu’elle a subi.

En effet, sa possibilité de solliciter des dommages-intérêts au titre de son préjudice matériel et économique ne fait pas débat.

A partir du moment où il est justifié, le cas échéant par une expertise judiciaire, la société pourra demander réparation de celui-ci.

Toutefois, le préjudice moral peut toujours être contesté par la partie adverse, et ne pas être retenu par le juge, dans la mesure où une personne morale n’est pas censée de prime abord pouvoir souffrir d’un préjudice d’ordre disons « psychologique ».

Comme l’indique la phrase célèbre : « je ne jamais déjeuné avec une personne morale ».

Depuis un arrêt de la chambre commerciale du 15 mai 2012, la solution a clairement été affirmée par la Cour de cassation : « Qu'en affirmant, péremptoirement, que s'agissant de sociétés, les exposantes ne peuvent prétendre à un quelconque préjudice moral, la Cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ».

Cette affaire portait sur une histoire de concurrence déloyale entre deux sociétés.

La Cour de cassation a donc clairement exprimé qu’une société pouvait souffrir d’un préjudice moral et en être indemnisée (Pourvoi n° 11-10278).

En revanche, la Cour de cassation s’oppose à ce que les sociétés puissent se prévaloir et être indemnisées d’une atteinte à leur vie privée.

Dans une arrêt du 17 mars 2016 (15-14.072), la première chambre civile de la Cour de cassation a en effet retenu « que, si les personnes morales disposent, notamment, d’un droit à la protection de leur nom, de leur domicile, de leurs correspondances et de leur réputation, seules les personnes physiques peuvent se prévaloir d’une atteinte à la vie privée au sens de l’article 9 du code civil, de sorte que la société ne pouvait invoquer l’existence d’un trouble manifestement illicite résultant d’une telle atteinte, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Dans cette affaire, une boulangerie estimait qu’une vidéo surveillance pouvait potentiellement porter atteinte à sa vie privée, ce que la Cour de cassation a rejeté.

Les demandeurs, principal et reconventionnel à une action, peuvent donc solliciter des dommages-intérêts pour le préjudice moral d’une société s’ils en justifient, sans pouvoir aller jusqu’à demander des dommages-intérêts pour la violation de la vie privée de la société.

C’est pour le moment la position de la Cour de cassation.

Maxence Perrin
Avocat au barreau de Dijon en droit commercial








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