Bien déclarer sa créance à l’encontre d’une société rencontrant des difficultés économiques

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Tout créancier d’une société, doit veiller à surveiller que celle-ci ne fasse pas l’objet d’une procédure collective, qui peut être de sauvegarde, redressement ou liquidation. En effet, en pareil cas, le créancier doit surtout ne pas oublier de déclarer sa créance antérieure au jugement d’ouverture, entre les mains de l’administrateur désigné dans un délai de 2 mois à compter du jour du jugement d’ouverture de la procédure collective.


S’il ne le fait pas, il est forclos à déclarer sa créance, et ainsi sauf à déposer une requête en relevé de forclusion pour juste motif légitime, sa créance n’est plus recevable à être inscrite au passif de la société faisant l’objet d’une procédure collective.


Dans la perspective de ne pas laisser s’écouler de tels délais, il faut surveiller les journaux d’annonces légales et le plus simple est de  vérifier régulièrement sur le site internet du BODACC (bulletin officiel des annonces civiles et commerciales) que la société ne fait pas l’objet d’une procédure de sauvegarde, redressement ou liquidation : httsp://www.bodacc.fr/


Pour déclarer sa créance, l’entreprise ou le particulier peut le faire seul entre les mains du mandataire en utilisant un courrier recommandé avec accusé de réception, ou avoir recours à un avocat habitué à réaliser ce type de formalité.


Précisons en outre que la déclaration de créance interrompt les délais de prescription sachant qu’elle « équivaut » à une demande en justice (article L622-25-1 du Code de commerce).


Les mentions que doivent comporter la déclaration de créance :


Les mentions prévues par la loi doivent être strictement respectées afin d’éviter l’irrecevabilité de la déclaration de créance.


A la faveur de l’article L622-25 du Code de commerce :

« La déclaration porte le montant de la créance due au jour du jugement d'ouverture avec indication des sommes à échoir et de la date de leurs échéances. Elle précise la nature du privilège ou de la sûreté dont la créance est éventuellement assortie.

Lorsqu'il s'agit de créances en monnaie étrangère, la conversion en euros a lieu selon le cours du change à la date du jugement d'ouverture.

Sauf si elle résulte d'un titre exécutoire, la créance déclarée est certifiée sincère par le créancier. Le visa du commissaire aux comptes ou, à défaut, de l'expert-comptable sur la déclaration de créance peut être demandé par le juge-commissaire. Le refus de visa est motivé. »

Suivant les dispositions de l’article R622-23 du Code de commerce :

« Outre les indications prévues à l'article L. 622-25, la déclaration de créance contient :

1° Les éléments de nature à prouver l'existence et le montant de la créance si elle ne résulte pas d'un titre ; à défaut, une évaluation de la créance si son montant n'a pas encore été fixé ;

2° Les modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté, cette indication valant déclaration pour le montant ultérieurement arrêté ;

3° L'indication de la juridiction saisie si la créance fait l'objet d'un litige.

A cette déclaration sont joints sous bordereau les documents justificatifs ; ceux-ci peuvent être produits en copie. A tout moment, le mandataire judiciaire peut demander la production de documents qui n'auraient pas été joints. »

A cette fin, le site service-public prévoit un formulaire CERFA type pour déclarer une créance simplement auprès du mandataire :

https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/R22360



Les exceptions : les créances postérieures au jugement d’ouverture de la procédure collective sont payées à leur échéance lorsqu’elles sont nécessaires au déroulement de la procédure ou interviennent en contrepartie d’une prestation fournie au débiteur


Les dispositions de l’article L622-17 du Code de commerce prévoient expressément que « I.-Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance.

II.-Lorsqu'elles ne sont pas payées à l'échéance, ces créances sont payées par privilège avant toutes les autres créances, assorties ou non de privilèges ou sûretés, à l'exception de celles garanties par le privilège établi aux articles L. 3253-2L. 3253-4 et L. 7313-8 du code du travail, des frais de justice nés régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure et de celles garanties par le privilège établi par l'article L. 611-11 du présent code.

III.-Leur paiement se fait dans l'ordre suivant :

1° Les créances de salaires dont le montant n'a pas été avancé en application des articles L. 3253-6L. 3253-8 à L. 3253-12 du code du travail ;

2° Les prêts consentis ainsi que les créances résultant de l'exécution des contrats poursuivis conformément aux dispositions de l'article L. 622-13 et dont le cocontractant accepte de recevoir un paiement différé ; ces prêts et délais de paiement sont autorisés par le juge-commissaire dans la limite nécessaire à la poursuite de l'activité pendant la période d'observation et font l'objet d'une publicité. En cas de résiliation d'un contrat régulièrement poursuivi, les indemnités et pénalités sont exclues du bénéfice du présent article ;

3° Les autres créances, selon leur rang.

IV.-Les créances impayées perdent le privilège que leur confère le II du présent article si elles n'ont pas été portées à la connaissance de l'administrateur et, à défaut, du mandataire judiciaire ou, lorsque ces organes ont cessé leurs fonctions, du commissaire à l'exécution du plan ou du liquidateur, dans le délai d'un an à compter de la fin de la période d'observation. Lorsque cette information porte sur une créance déclarée pour le compte du créancier en application de l'article L. 622-24, elle rend caduque cette déclaration si le juge n'a pas statué sur l'admission de la créance. »

En d’autres termes, le jugement d’ouverture d’une procédure collective « efface temporairement » le passif de l’entreprise, qui ne peut plus être recouvré pendant la période d’observation et qui peut seulement être déclaré, de manière à ce que l’entreprise reconstitue sa trésorerie : c’est une « bouffée d’oxygène » pour l’entreprise.


Les suites de la déclaration de créance 


L’administrateur va interroger le débiteur pour vérifier s’il conteste ou accepte la créance déclarée. Si la créance est contestée, le créancier sera averti par le mandataire dans un délai de 30 jours, puis il devra adresser ses observations écrites. Si le désaccord persiste, le juge commissaire tranchera sur l’admission ou non de la créance.


Si un plan de sauvegarde est accordé, un échelonnement des paiements des créances sera accordé au débiteur bénéficiaire du plan. A défaut s’il est en état de cessation des paiements, un jugement d’ouverture du redressement judiciaire sera rendu, puis un jugement d’ouverture d’une liquidation judiciaire si aucun plan de continuation ne peut être adopté.

Tenant les délais et formes à respecter, et la spécificité de la matière, pour qu’une créance soit bien admise au passif de la société faisant l’objet de la procédure collective, puis ensuite remboursée, nous préconisons à tout créancier de consulter un avocat pour être accompagné et tenter de recouvrer le montant de sa créance.


Maxence PERRIN

Avocat à DIJON en droit des affaires

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