L’avocat qui oublie de signer une convention d’honoraires perd-t-il le droit à ses honoraires ?

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La question de la rémunération de l’avocat en l’absence de lettre de mission ou de convention d’honoraires écrite suscite de nombreux débats, tant en doctrine qu’en jurisprudence. Si la réglementation professionnelle impose la rédaction d’un tel document, l’absence de sanction spécifique interroge sur les conséquences pratiques pour l’avocat et son client.
L’article 11 du Règlement Intérieur National de la profession d’avocat (RIN) précise l’obligation pour l’avocat d’établir une lettre de mission ou un mandat écrit avec son client. Selon le texte :
« L’avocat informe son client, dès sa saisine, des modalités de détermination des honoraires et l’informe régulièrement de l’évolution de leur montant. L’avocat informe également son client de l’ensemble des frais, débours et émoluments qu’il pourrait exposer.» 
« Sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés ».
Le RIN ne prévoit aucune sanction spécifique en cas de défaut de rédaction d’une lettre de mission. Cette absence de sanction expresse a conduit la jurisprudence à se prononcer sur les conséquences pratiques pour l’avocat, notamment en matière de perception des honoraires.
Plusieurs décisions de justice ont affirmé que le défaut de convention d’honoraires écrite ou de lettre de mission ne prive pas l’avocat du droit de percevoir une rémunération pour les diligences accomplies :
Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 19 déc. 2017, n° 16/19160 : « L’article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi Macron du 6 août 2015, n’assortit l’obligation de convenir d’une convention d’honoraires d’aucune sanction, il n’y a pas lieu de tirer de l’absence d’une telle convention l’impossibilité pour l’avocat de solliciter toute rémunération des diligences accomplies. » 
Cour de cassation, deuxième chambre civile, 14 juin 2018, n°17-19.709 : « Le défaut de signature d'une convention ne prive pas l'avocat du droit de percevoir pour ses diligences, dès lors que celles-ci sont établies, des honoraires qui sont alors fixés en tenant compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci. »
La lettre de mission est une obligation déontologique essentielle dans la relation avocat-client. Toutefois, son absence n’emporte pas, à ce jour, de sanction automatique sur le droit de l’avocat à percevoir des honoraires, ceux-ci pouvant être fixés par le juge selon les critères légaux si la mission a été effectivement réalisée. L’établissement d’une lettre de mission demeure cependant une garantie de sécurité juridique et de transparence pour les deux parties.

Maxence PERRIN
​​​​​​​Avocat d'affaire à DIJON

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